Port-au-Prince, le 28 décembre 2021.-
Le Rectorat de l’Université d’État d’Haïti (UEH) a appris avec satisfaction la nouvelle de l’inscription des savoirs, du savoir-faire et des pratiques qui sont liés à la Soup Joumou ou Soupe de l’Indépendance sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité, dans le cadre de la Convention pour la Sauvegarde du patrimoine culturel immatériel de 2003. Cette inscription est une source de fierté pour Haïti et pour l’Université d’État d’Haïti.
Cette inscription de la Soup Joumou sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité est en réalité l’un des extrants de la mise en œuvre du programme de formation dispensé à l’IERAH, à savoir le Programme de Maîtrise en Histoire, Mémoire et Patrimoine. Depuis 2006, des cadres sont ainsi formés dans le domaine de la sauvegarde du patrimoine haïtien et de la culture en général.
Il convient, par ailleurs, de souligner le professionnalisme qui a présidé au montage du dossier de la Soup Joumou. Se sont ici illustrés des cadres formés par l’UEH et œuvrant actuellement au sein des institutions culturelles de l’État haïtien. Le Rectorat veut ici adresser ses plus vives félicitations à tous ces professionnels qui, dans différents contextes, notamment au Ministère de la Culture et de la Communication, à la Commission Nationale de Coopération avec l’UNESCO, à la Délégation Permanente d’ Haïti à l’UNESCO illustrent la qualité et la pertinence de la formation reçue à l’UEH. A tous ces organismes de l’Etat et à leurs dirigeants, le Rectorat présente ses chaleureux compliments.
La Soup Joumou, comme cela a été dit, est la Soupe de l’Indépendance. L’événement que constitue déjà son inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité, incite à dépasser le seul fait de la reconnaissance mondiale d’un patrimoine que les générations d’Haïtiens ont su fidèlement conserver. Cette inscription invite à souligner le contexte d’apparition de la Soup Joumou. Sa réappropriation par les Nouveaux Libres de 1804 est en fait contemporaine de l’émergence d’un nouvel âge de l’humanité, une humanité qui est appelée à se débarrasser à jamais de toute forme d’esclavage. En fait, à partir d’Haïti et à partir de 1804, la Soup Joumou est devenue un symbole de liberté pour toutes les femmes et les hommes du monde à venir.
Qu’à l’occasion de cette inscription de la Soup Joumou sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité, grâces soient rendues à toutes les mains invisibles qui ont permis la sauvegarde de ce patrimoine immatériel : la très respectable lignée des cultivateurs anonymes du joumou et autres ingredients, les infatigables commerçantes et commerçants qui, de marché en marché, très souvent dans des conditions de transport difficiles, ont toujours rendu accessible ce joumou et, cerise sur le gâteau, la respectable légion des spécialistes ordinaires de l’art culinaire qui ont su transmettre, de génération en génération, les secrets de la préparation de cette soupe, de la liste raffinée des ingrédients et de la cuisson de ce merveilleux plat.
Par ailleurs, la reconnaissance mondiale de ce patrimoine immatériel qu’est la Soup Joumou devrait s’étendre à l’ensemble du mouvement social qui a abouti, au terme d’une mobilisation et d’une guerre de libération exceptionnelles, à l’abolition de l’esclavage sur la terre d’Haïti, prélude de toutes abolitions. Si l’on doit rendre hommage aux antécédents aussi bien intellectuels que politiques qui ont alimenté, ailleurs, la quête de liberté, la Guerre de l’Indépendance d’Haïti, le lourd tribut versé à cette occasion par les esclaves eux-mêmes, la transfiguration, le 1er janvier 1804, de l’ancienne colonie en terre de liberté, tout cela mérite la reconnaissance formelle de l’humanité. Pareille reconnaissance viendrait en quelque sorte rectifier le refus longtemps tenace d’une bonne partie de la communauté internationale d’admettre la grandeur de cette conquête ainsi que le nouveau statut d’Haïti. N’y a-t-il pas aussi, à travers les âges, une Dette internationale de Reconnaissance à l’égard de ce fait majeur de l’histoire de l’humanité que constitue l’Indépendance d’Haïti ?
À l’approche du nouvel an et à la veille de la Fête de l’Indépendance Nationale, le Rectorat de l’Université d’État d’Haïti veut encourager l’État haïtien et la société en général à profiter de cette inscription pour mobiliser l’ensemble de la Nation dans un élan de fidélité aux idéaux de 1804, de réconciliation et de récupération de la souveraineté nationale, lors du partage de la Soup Joumou, ce 1er janvier 2022.
Vive Haïti ! Vive la Soup Joumou ! Vive notre avenir en commun !